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Competition policy newsletter No 2, June 1999

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EC

COMPETITION POLICY NEWSLETTER

Editor: Henrik Mørch Production & Layout: Vicky Hannan

Address:

European Commission, C150, 00/158

Wetstraat 200, rue de la Loi Brussel B-1049 Bruxelles Tel : +322 2957620 Fax : +322 2955437

Electronic Mail: X400: C=be;A:rtt;P:œc; OU=dg4;S=info4

Internet: lnfo4@dg4.cec.be World Wide Web: http://europa.eu.inty comm/dg04/

ISSN 1025-2266

1999

number 2

June

c o m p e t i t i o n p o l i c y

NEWSLETTER

Published three times a year by the Competition Directorate-General of the European Commission

Contents

Articles

1 Deux mandats comme Commissaire à la Concurrence : un bilan, par Karel VAN MIERT

16 Au revoir à Karel Van Miert, Un Commissaire européen aux convictions fortes, par Alexander SCHAUB

Opinion and comments

19 Comment on the Judgment of the Court of First Instance of 25 March 1999 in the merger case IV/M.619 - Gencor/Lonrho, by Peder CHRISTENSEN and Philip OWEN

Anti-trust Rules

24 Professions libérales : aspects essentiels de l'action de la Commission en matière d'application de concurrence, par Maria-José BICHO

Mergers

27 Recent developments and important decisions, by Geraldine EMBERGER and

Tiina PITKÄNEN

Liberalisation & State intervention

34 Desserte gazière en France : la Commission obtient la modification des règles en matière d'établissement de nouveaux distributeurs, par Christian LEVASSEUR

State Aid

37 Commission proposes change to Transparency Directive, by Karl SOUKUP 38 Study on the application of EC state aid law by the courts of Member States, by Adinda SINNAEVE

41 Principaux développements du 1er Janvier au 31 mars 1999

Information Section 50 DG IV Staff list 52 Documentation 68 Coming up

69 CASES COVERED IN THIS ISSUE

Deux mandats comme Commissaire à la

Concurrence : un bilan.

Karel VAN MIERT, Commissaire chargé de la Concurrence

Introduction

Lorsqu'en janvier 1993 j'ai pris en charge la responsabilité de conduire la politique de concurrence de la Commission Européenne, j'avais la conviction forte que, pour jouer pleinement son rôle, la politique de la concurrence ne peut se concevoir isolément du projet politique et social plus vaste que l'Article 2 du Traité assigné à l'Union: la promotion du progrès économique et social, d'un niveau d'emploi élevé et d'un développement équilibré et durable. Je ne l'ai jamais caché, pour moi la politique de concurrence n'est pas une fin en soi. C'est un moyen qui, conjugué harmonieusement aux autres politiques de l'Union, doit nous permettre d'atteindre ces objectifs.

C'est la raison pour laquelle, dans tous les domaines que recouvre la politique de concurrence, je me suis attaché à promouvoir une conception équilibrée et respectueuse de l'intérêt général, ainsi qu'une application tout à la fois flexible, pour être proche des réalités économiques, et rigoureuse car les marchés ont besoin de règles du jeu claires. Aujourd'hui, près de sept années plus tard, je n'ai pas varié sur

ce point et l'examen de la politique menée au long de ces deux mandats me semble le confirmer amplement.

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ARTICLES

et dans l'action publique, le droit de la concurrence, parce qu'il touche au cœur des phénomènes économiques, s'affirmait comme un instrument essentiel de politique économique en Europe. Parallèlement, la globalisation des phénomènes économiques suscitait de nombreuses initiatives visant à permettre aux autorités publiques de prendre la mesure de phénomènes qui désormais dépassent souvent le cadre géographique d'un Etat ou d'un ensemble d'Etats. Ce phénomène explique et justifie la multiplication des accords bilatéraux de coopération et l'intérêt suscité par l'initiative prise par la Commission Européenne de constituer un groupe de travail sur ce sujet au sein de l'OMC.

Cette expansion géographique du champ d'action des politiques de concurrence s'est doublée, pour les même raisons, d'une extension rapide de champ d'application à de nouveaux domaines. La libéralisation des industries de réseau traditionnel-lement sous monopole - hier le transport aérien, aujourd'hui les télécommunications, demain les secteurs de l'énergie et de la Poste - était une condition sine qua non de la compétitivité internationale de l'industrie européenne et constitue pour une large part la conséquence de

l'internationalisation des échanges et de la pression concurrentielle qu'elle fait peser sur les industries européennes. Dans le même temps, l'extension du domaine marchand et les phénomènes induits par la

révolution digitale ont conduit à une véritable irruption de la concurrence et du droit de la concurrence, dans des domaines dont ils étaient traditionnel-lement absents. L'importance croissante que prend la politique communautaire de concurrence dans des domaines comme le sport ou l'audiovisuel, en est le meilleur exemple. Enfin, la poursuite de l'intégration communautaire, et notamment la mise en place de l'Euro a entraîné un fort développement du droit de la concurrence dans le domaine des services bancaires et financiers. Au demeurant, et notamment dans ces différents domaines (services financiers, audiovisuel), le contrôle des aides d'état a pris une dimension nouvelle, appréhendant, non seulement les aides directes, mais aussi des formes d'aides plus sophistiquées (réductions fiscales ou de charges sociales en particulier).

Face à cette nouvelle donne, dans ces nouveaux secteurs comme dans ses domaines traditionnels d'application, la politique de concurrence menée au long des années 90, a permis de garantir que les bénéfices attendus du développement de la concurrence et de l'accélération du processus d'intégration communautaire, profitent au consommateur et ne soient pas captés par un ou plusieurs opérateurs utilisant, seuls ou collectivement, leur pouvoir de marché à leur unique profit. La Commission a dû pour cela faire face à une augmentation continue et rapide d'une masse

de cas, par ailleurs de plus en plus complexes, au prix d'adaptations législatives permettant une meilleure efficacité, au prix surtout d'un effort intense et soutenu de la part de l'ensemble des fonctionnaires impliqués, à la DG IV au premier chef, mais aussi dans les services associés et au sein de mon cabinet.

Pour relever ce défi durablement et garantir que la concurrence fonctionne bien au sein du marché unique, de nouvelles évolutions législatives plus radicales sont nécessaires, notamment dans les domaines des ententes et des abus de position dominante, mais aussi dans celui des aides d'états. Parallèlement, il faudra poursuivre l'effort entrepris en vue de l'établissement à terme d'un cadre multilatéral pour les règles de concurrence. Le Traité a la flexibilité nécessaire pour permettre à la politique de concurrence de faire face aux nouveaux enjeux auxquels elle est confrontée. C'est à ce prix qu'elle conservera son efficacité pour entrer dans le nouveau millénaire, entraînant de multiples bénéfices, tant pour les consommateurs que pour la compétitivité globale de l'industrie européenne, notam-ment en termes d'innovation; de multiplication des biens, produits et services offerts; de baisse des prix et d'amélioration de la qualité.

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ARTICLES

I - Les missions

Le droit communautaire de la concurrence est au cœur des règles du jeu qui régissent les marchés. Il comporte, comme la plupart des droits de concurrence des dispositions permettant une action structurelle (Article 86 (ex Article 90) et Articles 87 à 89 (ex 92 à 94) du Traité; Règlement concentration) ainsi que des dispositions permettant de contrôler le comportement abusif des acteurs économiques sur le marché (Articles 81 et 82 (ex 85 et 86)).

Toutefois, le droit communautaire de la concurrence présente deux originalités:

Outre les dispositions classiques relatives aux entreprises (droit des ententes, (article 81 du Traité), droit des abus de position dominante (article 82 du Traité) et droit des concentrations (règlement du Conseil n° 4064/89 modifié)); il contient des règles de concurrence relatives aux Etats membres de la Communauté (article 86 et droit des aides d'Etat (articles 87 à 89 du Traité)). Cette particularité tient pour une large part à l'originalité de la construction institution­ nelle communautaire elle­même. Plus qu'une zone de libre échange, plus qu'une union douanière, sans être une construction fédérale, ni même à proprement parler confédérale, le marché commun suppose un régime assurant que la concurrence n'est pas faussée,

que ce soit par des actions d'entreprises ou par des actes d'autorités publiques (Article 3 g du Traité).

L'autre originalité réside dans la pluralité d'objectifs affectés par le Traité au droit communautaire de la concurrence. Tous les droits de la concurrence présentent un caractère commun: ils visent à promouvoir une allocation optimale des ressources par le marché, tant en termes statiques (maximisation des quantités mises sur le marché et donc meilleur prix pour les demandeurs), qu'en termes dynamiques (promotion de l'innovation et optimisation de la capacité d'adaptation des structures économiques). Mais le Traité fait également de la politique de concurrence un instrument au service de la politique générale d'intégration communautaire. En effet, les distorsions de concurrence, qu'elles trouvent leur source dans les pratiques anticoncurrentielles des entreprises ou dans l'action des autorités publiques peuvent affecter directement le processus d'intégration communautaire en maintenant artificiellement des barrières aux échanges inter­ étatiques. Enfin, le droit communautaire de la concurrence est conçu comme un instrument contingent au service d'une politique globale, permettant de poursuivre des objectifs autres que la stricte efficacité économique (telle que définie plus haut), à travers la notion de bilan économique que l'on trouve dans l'article 81.3. En un mot, le traité conçoit la

concurrence comme un moyen, et non comme une fin en soi, la mise en œuvre de la politique de concurrence se doit donc d'être marquée par un souci d'équilibre.

II ­ Le souci d'équilibre

Fondé sur l'analyse économique, le droit de la concurrence doit nécessairement être évolutif et adaptable, dans le cadre d'une approche intégrée, respectueuse de l'intérêt général (article 86.2 du Traité). C'est cette notion d'équilibre évolutif qui définit, à mon sens le mieux, la politique menée depuis sept années.

La politique de concurrence menée sur les questions touchant à la protection de l'environ­ nement illustre bien ce propos. Au sommet européen de Cardiff, puis au sommet de Vienne, les États membres avaient rappelé les dispositions du traité d'Amsterdam1 qui stipulent que

la protection de l'environnement est prise en compte dans l'ensemble des politiques de la Communauté afin de réaliser un développement durable. En 1997, la Commission a précisé sa politique en la matière en ce qui concerne l'application de l'article 81.3 du Traité2. Elle l'a

1 Article 6 du traité consolidé.

« Dans son analyse des affaires individuelles, la Commission met en balance les restrictions de concurrence découlant de l'accord et les objectifs en matière d'environnement que cet accord permet d'atteindre en appliquant le principe de proportionnalité selon l'article 85, paragraphe 3. En particulier, la protection de l'environnement est

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ARTICLES

mise en œuvre en 1998 en approuvant des accords d'entreprises bénéfiques pour l'environnement3. Elle a également clarifié son interprétation de l'encadrement communautaire des aides d'État pour la protection de l'environnement4 en autorisant, pour des durées limitées pouvant aller jusqu'à cinq ans, des aides au fonctionnement en faveur de l'utilisation de sources d'énergie renouvelables5 et en autorisant sous certaines conditions des aides au fonctionnement à des fins de protection de 1 ' environnement6.

considérée comme un élément qui contribue à l'amélioration de la production ou de la distribution et à la promotion du progrès économique et technique. » (XXVe Rapport sur la politique de concurrence)

3 Approbation d'un accord signé entre

l'Association européenne des producteurs de biens de consommation électroniques (EACEM) et seize de ses membres, qui consiste à réduire la consommation d'électricité de leurs appareils lorsqu'ils sont en mode d'attente. Approbation d'un accord pris au sein de l'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA), comportant l'engagement de réduire les émissions de C02 provenant des véhicules de tourisme. Cet engagement, qui comporte un objectif de réduction de 25% des émissions pour l'année 2008, rejoint la politique communautaire de limitation des rejets de C02 dans l'atmosphère.

4JO C 72 du 10.3.1994.

5Cas N 752/97, Électricité verte, JO C

244 du 4.8.1998 et cas N 153/98, "Non-fossil fuel obligation for renewables", JO C 300 du 29.9.1998.

6Cas N 513, 755 et 754/97, JO C 156 du

21.05.1998 et cas N 813/97, JO C 264 du 21.8.1998.

Ce souci d'équilibre se retrouve également dans la façon dont la Commission a mené sa politique de libéralisation. Depuis 1995, le débat sur les services d'intérêt général a émergé avec force en Europe, notre environnement économique et social ayant subi une mutation, d'une rapidité sans précédent, au cours des quinze dernières années, rendant indispensable une adaptation, plus ou moins radicale selon les secteurs, des modalités d'organisation juridique des marchés. La politique de libéralisation de la Commission, ce n'est rien d'autre que réaliser cette adaptation indispensable en respectant le nécessaire équilibre entre la flexibilité et l'adaptabilité qu'apporte l'ouverture au marché et les

impératifs d'intérêt général (solidarité économique et sociale, sécurité d'approvision-nement, protection de l'environnement,...).

Au demeurant, les deux intérêts qu'il s'agit de concilier, ne sont pas fondamentalement opposés7.

' Un exemple permet d'illustrer ce propos et de montrer que l'opposition manichéenne que l'on fait trop souvent, au nom même de la protection de l'usager, entre politique de concurrence et service public, est vide de sens : En 1992, SPEGNN a porté plainte auprès de la Commission au titre de l'Article 90 en conjonction avec l'article 86 du traité, contre le régime juridique encadrant la distribution de gaz en France. Celui-ci aurait amené, selon les plaignants, Gaz de France (GDF) à abuser de sa position dominante. En effet, l'application qui était faite par GDF et les autorités publiques de tutelle, de la loi de nationalisation de

1946, qui avait conféré à GDF le

Là où l'on peut déjà en juger, les résultats sont d'ailleurs probants: baisse des prix, amélioration de la qualité et diversification des services se sont accompagnés d'un maintien voire d'un renforcement des missions de Service Public. Ce dont il s'agit, c'est d'organiser une véritable solidarité, de préserver et de développer le lien social, dans le cadre de l'évolution dynamique de l'économie et dans le contexte de l'ouverture des marchés à la concurrence intérieure et extérieure. Cet équilibre est naturellement variable en fonction des secteurs et sur le plan législatif, la politique de libéralisation revêt donc naturellement des visages distincts et avance à différentes vitesses selon la spécificité de

monopole de la distribution de gaz en France, conduisait à ce que GDF puisse refuser la desserte en gaz d'une commune, lorsque celle-ci ne paraissait pas suffisamment profitable en fonction de normes de profitabilité édictées par l'Etat, tout en interdisant, au nom de son monopole, à un opérateur privé plus performant, ou se satisfaisant d'une moindre profitabilité, d'assurer alors cette même desserte. Alors même que le monopole était défaillant, pour reprendre l'expression de la Cour de Justice dans l'Arrêt Hoffher, et que d'autres opérateurs s'offraient à rendre le service à l'usager, ils en étaient empêchés, au nom même du Service Public. La Commission a préparé une décision établissant que la France violait ainsi l'Article 90(1) en conjonction avec l'Article 86 du traité. Le 3 juin 1998, le parlement français mettait fin à cette infraction en adoptant une loi créant un nouveau cadre juridique autorisant les communes à s'adresser au distributeur de leur choix. De nombreuses communes qui n'étaient pas desservies en gaz pourront ainsi l'être désormais, au bénéfice des citoyens.

4 Competition Policy Newsletter ir ir ir ir

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ARTICLES

chaque secteur. Nous sommes allés très vite dans un secteur comme les télécommunications, caractérisé par une haute intensité en capital, des marchés qui se globalisent et une accélération sans précédent de l'évolution technologique. Ces trois défis imposaient que les entreprises communautaires de télécommunications puissent jouir de la souplesse que seul procure un cadre libéralisé. Dans d'autres secteurs, comme la poste ou l'énergie, dans lesquels les problèmes se posent d'une façon différente, nous avons agit différemment. Car à l'inverse d'une doctrine globale du Service Public, la démarche communautaire, soutenue par pratiquement tous les Etats membres8 est d'appliquer, au cas par cas, compte tenu des caractéristiques de chaque secteur, les quelques grands principes que je viens d'évoquer.

III - Les développements

Globalisation, approfondis-sement du marché unique, révolutions technologiques, ces phénomènes ont entraîné ces sept dernières années, des mutations substantielles de l'activité de la Commission en

o

° La Cour de Justice des Communautés, la Cour de Luxembourg, a elle aussi continué de jouer le rôle très important qui est le sien dans ce domaine. Son arrêt de février 1997 sur "la poste" et les missions d'intérêt public dans le contexte des aides, ou les arrêts d'octobre 1997 "gaz et électricité" ont apporté, aux uns et aux autres, des clarifications importantes.

matière de concurrence. L'augmentation quantitative d'activité se double d'une complexification croissante des cas traités ainsi que d'une extension du droit de la concurrence à de nouveaux domaines.

1- Analyse quantitative

Les développements que j'ai évoqués plus haut ont entraîné un accroissement considérable du nombre de cas notifié dans le domaine des concentrations entre entreprises ainsi que, dans une moindre mesure dans le domaine des articles 81 et 82. En ce qui concerne les aides d'Etat, le nombre de cas est resté étale entre 600 et 700 cas par an et a même diminué en 1998 (444 cas). Toutefois, le nombre de nouveaux cas enregistrés pour les deux premiers mois de 1999 (128) laisse augurer qu'il ne s'agissait là que d'un épiphénomène. S'agissant des articles 81 et 82, le nombre de cas nouveaux enregistré était d'environ 400 en 1993 et s'est stabilisé autour de 500 (509 en 1998). Dans le même temps, les affaires ouvertes à l'initiative de la Commission ont cru considérablement (26 en 1993 contre 101 en 1998) de même que, dans une moindre mesure le nombre de plaintes (110 en 1993 contre 192 en 1998). C'est dans le domaine des concentrations que l'augmentation de la charge de travail a été la plus spectaculaire, puisque le nombre de cas traités a été multiplié par près de quatre entre 1993 et 1998

(71 décisions en 1993, 248 en 1998).

2- Les nouveaux secteurs

Outre le processus de libéralisation stricto sensu, la concurrence et le droit de la concurrence ont fait une entrée en force dans différents domaines restés abrités jusque là, ainsi que dans de nouveaux marchés émergents.

Là comme ailleurs, dans chacun des nouveaux secteurs qu'elle investit, la politique de concurrence a une obligation de vigilance quotidienne, dans des marchés dont la réalité change au jour le jour. Cette vigilance doit s'exercer à tous les niveaux: Aides d'Etat où les domaines d'investigation de la Commission se sont étendus à des secteurs comme les secteurs bancaires (dossier Crédit Lyonnais) et de l'audiovisuel (financement des télévisions publiques) et où il importe de garantir que des phénomènes massifs de subventionnement croisé ne voient pas le jour; Article 86, le cas échéant en liaison avec l'Article 90, afin d'éviter que les monopolistes d'hier n'utilisent leur pouvoir de marché pour maintenir artificiellement leur mainmise sur le marché ou pour l'étendre à de nouveaux domaines (convergence); Article 85 pour que ne soient pas recréés par la cartellisation, les anciens

obstacles réglementaires; contrôle des concentrations, pour

éviter la fossilisation des positions acquises autour de champions purement nationaux

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ARTICLES

et la monopolisation durable de marchés émergents.

L'apparition et le développement rapide de la convergence et des nouvelles technologies, qui recouvre des phénomènes aussi distincts mais aussi liés entre eux que le développement de Γ internet, du commerce électronique, des services de téléphonie à valeur ajoutée et de la télévision numérique, a confronté la politique de concurrence à de nouvelles problématiques. C'est ainsi que dans le domaine de la télévision numérique et des nouvelles offres qu'elle permet de mettre à la disposition du consommateur,

la politique de concurrence a joué un rôle majeur pour promouvoir un cadre de développement équilibré, permettant le développement rapide de ces services9, tout en

évitant que des groupes puissants ne monopolisent ces marchés avant même qu'ils n'existent vraiment10. Tel est également le

cas dans le domaine du sport, d'où le droit de concurrence était totalement absent jusqu'à une date récente (arrêt Bosman11).

Depuis lors, le droit de la concurrence a littéralement fait irruption dans le monde du sport, il est par ailleurs, de plus en plus appliqué dans le domaine des

9 décision BIB et la décision très prochaine dans l'affaire TPS

' " décisions Kirch/Bertelsmann et Kirch/Bertelsmann/Deutsche Telekom (1998)

1 1 Arrêt du 15 décembre 1995, Bosman, affaire C­415/93, Ree. ρ I­ 4921

droits de retransmission des événements sportifs. Un grand nombre de cas dans ce secteur sont maintenant en cours d'examen à la Commission, bien que la pratique décisionnelle de la Commission soit nécessairement encore limitée, puisque seules quatre décisions formelles ont été adoptées12. La

Commission se trouve confrontée dans le traitement de ces cas à de très nombreuses et très diverses questions. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à mes services, en collaboration avec ceux de M. Oreja, de concevoir un document interne à la Commission13 qui :

établisse une typologie des questions auxquelles nous sommes confrontés 14 ; souligne

les spécificités de ce secteur au regard du droit de la concurrence et; définisse des principes de traitement des cas respectueux de cette spécificité.

1 2 décisions: Dunlop/Slazenger du 18.03.1992 JO L131 du 16.05.1992; Tretorn du 21.12.1994, JO L378 du 31.12.1994; Forfaits touristiques du 27.10.1992, JO L326 du 12.11.1992; et UER du 11.06.1993, JO L179 du 22.07.1993

1 J "Orientations préliminaires sur l'application des règles de concurrence au secteur du sport" document interne adopté par la Commission le 24.02.1999.

Le document les regroupe très schématiquement de la façon suivante : les questions tenant à l'organisation territoriale du sport (délocalisation des clubs, organisation sur une base nationale,...); les questions tenant au rôle régulateur des organisateurs d'événements sportifs, les questions tenant au rôle juridictionnel des organisations sportives; les règles de transfert de joueurs.

IV - Les actions menées

1­Antitrust

La Commission a procédé à de nombreux ajustements de nature législative et interprétative au cours de ses deux mandats. La Commission a notamment adopté différents textes permettant d'améliorer l'efficacité et la lisibilité de la politique de concurrence15. Elle

a, par ailleurs, amélioré notablement la transparence de ses procédures et les garanties apportées aux droits de la défense en codifiant et en rendant publique sa politique en matière d'accès au dossier16.

L'activité en matière de mise en œuvre de l'article 81 a été fortement marquée par l'internationalisation des stratégies des entreprises. C'est ainsi que la Commission a autorisé, sous de strictes conditions de libéralisation de l'accès aux marchés domes­ tiques, la création d'Atlas,

^règlement sur les transports maritimes (1995); règlement d'exemption "distribution automobile" (1995); règlement d'exemption "transfert de technologies" (1996); lignes directrices sur le calcul des amendes (1997). Elle a par ailleurs adopté des textes ayant pour objectif de recentrer l'activité sur les infractions les plus graves (communication "leniency" (1996); nouvelle communication "de minimis" (1997) ). C'est dans le même esprit qu'elle a intensifié sa coopération avec les Etats membres (cf. ci­après "la réforme des outils")

" communication relative aux règles de procédures internes pour le traitement des demandes d'accès au dossier (1997)

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ARTICLES

entreprise commune entre France Télécom et Deutsche Telekom, ainsi que la coopération de cette entreprise avec l'entreprise américaine Sprint dans le cadre du projet "Global One" en vue de fournir des services de téléphonie à l'échelle mondiale17. Par

ailleurs, la Commission a ouvert, en 1996 des investigations concernant plusieurs cas d'alliances aériennes transatlan­ tiques, notamment entre British Airways et American Airlines ainsi qu'entre Lufthansa et United Airlines. Enfin, la Commission a autorisé de nombreuses coopérations internationales dans différents domaines18; dans d'autres cas, il

a fallu interdire des pratiques qui, au niveau international, conduisaient à de graves restrictions de concurrence19.

Cette internationalisation s'est doublée d'une extension du champ d'application des articles 81 et 82 à de nouveaux domaines de sorte que le droit de la Concurrence touche désormais tous les secteurs d'activité20.

En Europe, l'approfondissement du marché intérieur a entraîné

1 7 La Commission a traité selon les même lignes les notifications des alliances Unisource, Uniworld

1 8 cf. notamment les décisions « Iridium et BNP/ Dresdner Bank (1996)

1 9 Dans la décision TACA (1998), la Commission a condamné les membres du TACA à 273 millions d'Euros d'amende pour abus de position dominante collective.

υ cf. ci­avant "les nouveaux secteurs"

une activité accrue de la part des autorités de contrôle, d'une part parce qu'il a entraîné une intensification des coopérations transnationales intra­ européennes et; d'autre part car il a pu conduire à des actions concertées ou à des abus de positions dominantes, visant à préserver les situations acquises, mises en danger par l'intensification du jeu de la concurrence. L'irruption de la concurrence sur les marchés récemment libéralisés du transport aérien et de la téléphonie en Europe en est l'exemple le plus remarquable. Elle a entraîné des réactions prévisibles en termes d'alliances stratégiques et de coopération21

ainsi que des réactions de défense de la part des anciens monopolistes qu'il a fallu traiter en utilisant l'article 82 (le cas échéant en conjonction avec l'article 86)22. Pour autant,

l'approfondissement du marché intérieur a également entraîné une activité soutenue dans les domaines et les secteurs plus traditionnels d'application du droit antitrust. La Commission a

cf. affaires Lufthansa/SAS ou le rapprochement en cours entre KLM et Alitalia ; dans le domaine des télécommunications on a assisté à de nombreuses prises de participations croisées par les grands opérateurs européens et américains en vue de prendre pied sur d'autres marchés nationaux que celui de leur pays d'origine

2 2 cf. les nombreuses décisions prises sur base de l'article 82 (le cas échéant en conjonction avec l'article 86) en matière de téléphonie mobile et de gestion d'infrastructures portuaires et aéroportuaires

fait preuve en la matière d'une vigilance accrue pour garantir que les consommateurs et la compétitivité de l'industrie européenne retirent pleinement les bénéfices que l'on est en droit d'attendre d'un grand marché sans entraves. Elle a donc sanctionné de nombreuses ententes de répartition de marché visant à segmenter le marché unique23, ainsi que des abus de

position dominante répondant au même objectif24. Dans le même

esprit, la Commission a continué de lutter vigoureusement contre les ententes de prix25.

Tout au long de ces sept années, en recentrant son activité sur les procédures d'office et le traitement des plaintes26, en

améliorant et en adaptant son cadre législatif et interprétatif, en se montrant particulièrement vigilante dans les nouveaux

3 cf. notamment : en matière de cartels décisions «poutrelles» (1994); « carton » (1994) ; « ciment » (1994) ; »services de transbordement U K » (1996); «tubes de chauffage urbain » (1998) ­ en matière d'ententes verticales : décisions « Tretorn » (1994); «BASF» (1995); «Bayer» (1996) ; « Volkswagen » (1998)

2 4 cf. notamment les décisions «Deutsche Bahn» (1994); «Irish Sugar» (1997) e t ; «Vanden Bergh Food » (1998)

2 5 cf. notamment décisions : « Far Eastern Freight Conference » (1994) ; « CO API » ( 1995) ; « Association Néerlandaise des expéditeurs de marchandises» (1996); «lignes maritimes Grèce/Italie » (1998). Par ailleurs de nombreuses ententes de répartition de marché prévoyaient également des décisions en matière de prix.

2" voir ci­avant "Analyse quantitative"

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ARTICLES

secteurs sans relâcher sa pression dans les domaines traditionnels, la Commission Européenne a souhaité développer une politique de concurrence moderne et active en vue de garantir la plus grande efficacité du marché par la promotion d'un environnement authentiquement concurrentiel. Cet effort d'amélioration du cadre législatif et de l'efficacité du contrôle est pourtant loin d'être terminé et devra se poursuivre lors de la prochaine Commission27.

2­ Concentrations

Durant ces sept années, nous n'avons cessé d'adapter et de préciser à plusieurs reprises le régime communautaire de contrôle des opérations entre entreprises, afin de tenir compte de l'expérience acquise. Une première fois en 1994 en modifiant le règlement d'application ainsi que le formulaire de notification et en publiant quatre communications interprétatives sur la notion de concentration, la notion d'entreprises concernées, le calcul du chiffre d'affaires, et la notion d'entreprises communes. Une seconde fois en 1997 en modifiant le règlement 4064/89 sur plusieurs points importants (seuils, notion de concentration, possibilité d'accepter des engagements en phase I notamment) et en remettant à jour le règlement d'application, le formulaire CO et les communications interprétatives.

2 ' voir ci­après « la modernisation des outils »

Par ailleurs, les services de la Commission préparent une série de nouvelles communications sur la manière dont la Commission applique dans ses analyses différents concepts économiques. La première de ces communications sur la définition du marché pertinent a d'ores et déjà été adoptée par la Commission et publiée.

Ce qui frappe tout d'abord, s'agissant du contrôle des concentrations, c'est le formidable essor de cette activité qui atteste d'une activité sans cesse croissante en matière de fusions et concentrations transnationales, tant au sein du marché unique que dans le monde.

D'une part, la Commission a dû faire face à des opérations de plus en plus souvent mondiales, dont certaines mettaient aux prises des acteurs globaux opérant partout dans le monde, sur des marchés restant le plus souvent nationaux ou régionaux28, alors que d'autres

conduisaient à la création d'acteurs puissants sur des marchés mondiaux29. Ce dernier

type d'opérations soulève un

2° cf. notamment les décisions de la Commission dans les cas Guinness/GrandMet, Daimler Benz/Chrysler, BP/Amoco, Glaxo/Welcome, Smithkline/Beecham, Price Waterhouse/Coopers & Lybrand.

9 cf. notamment les décisions de la Commission dans les cas: Gencor/Lonrho; Anglo American/Lonrho; Boeing/McDonnell Douglas, AT&T/BT ou WorldCom/MCI.

véritable problème d'efficacité du contrôle démocratique face à des entreprises et des marchés qui se mondialisent et dépassent l'échelle de nos espaces politiques respectifs, d'autant que ces opérations aboutissent le plus souvent à changer fondamen­ talement la structure concurrentielle de secteurs entiers de l'économie. Au demeurant, dans certains secteurs, la consolidation est déjà telle que l'on touche aux limites de ce qui est acceptable au niveau mondial, je pense à « l'affaire Boeing » naturellement, mais aussi à celle des cabinets d'audit, ou, pour prendre un exemple dans l'antitrust traditionnel, aux coopérations stratégiques en matière de moteurs d'avions. De ce point de vue, l'expérience acquise par la Commission dans l'application de son accord avec les Etats­ Unis (voir ci­après), a été extrêmement positive. Elle a permis de renforcer la confiance entre la Commission et les autorités de la concurrence américaines et a facilité la mise en œuvre d'une approche de plus en plus convergente en ce qui concerne l'analyse des marchés et les mesures appropriées. L'enquête parallèle étroitement coordonnée, jusqu'au stade des remèdes à apporter, qui a été menée dans le cadre de l'opération de concentration WorldCom/MCI en est le meilleur exemple. A contrario, dans l'unique cas dans lequel une divergence importante s'est fait jour (Boeing/McDonnell/ Douglas), l'accord a permis de maintenir une relation confiante

8 Competition Policy Newsletter Λ . * * * » . il il it ir

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et un échange d'arguments dépassionné et productif.

D'autre part, la Commission a dû traiter un nombre sensiblement accru d'opérations essentielle-ment européennes, liées à l'approfondissement du marché unique. L'examen purement quantitatif des transactions de fusions et acquisitions montre bien le dynamisme particulier des mouvements de concentra-tions transnationaux en Europe dans un contexte général d'augmentation des fusions au niveau global30. Dans l'examen de ces cas essentiellement intra-européens, la Commission s'est attachée à éviter que des opérations de fusion ne viennent consolider ou créer des positions dominantes sur des marchés nationaux ou régionaux existants31 ou émergents32. De

3 0 L'évolution de la part des

transactions d'un montant supérieur à 500 millions de dollars impliquant une entreprise basée dans l'UE et une entreprise non-UE rapportée au nombre de transactions impliquant au moins une entreprise de l'UE est passé de 44% en 1985 à 22% en 1992 pour remonter à 39% pour les neuf premiers mois de 1998. Le constat est le même à partir du nombre de transactions notifiées à la Commission. La part relative des transactions impliquant au moins une entreprise non-UE est passée de 47% en

1990/91 (de septembre à août) à 29% en 1992/93 et à 39% en 1997/98.

Voir notamment les décisions Skanska/Scancem, Kesko/Tuko, Blokker/Toys'R'US, Coca Cola/Carlsberg, Agfa Gevaert/DuPont,

Kimberly-Clark/Scott Paper, RTL/Veronica Endemol et Nordic

Sattelite Distribution.

J Z Décisions Kirch/Bertelsmann;

Kirch/Bertelsmann/Deutshe Telekom

même, nous nous sommes opposés à des opérations qui auraient eu pour effet de supprimer virtuellement toute concurrence pour les produits en cause dans l'ensemble du marché commun33.

En ce qui concerne l'examen au fond des affaires de concentrations, ces sept années ont été riches en développement pour cette discipline encore jeune puisque le règlement "concentrations" fêtera cette année ses 10 ans. Il y aurait beaucoup à dire, mais je voudrais insister sur trois aspects qui me paraissent essentiels : le développement d'une analyse des situations de dominance oligopolistiques; la prise en compte croissante des effets verticaux et; l'apparition suite à la révision du règlement d'une analyse des effets de coordination entre entreprises mères d'une filiale commune concentrative. Sur le premier point, la Commission a très tôt estimé que le règlement devait nécessairement couvrir les situations de dominance oligopolistiques34. Elle a par la suite continûment développé et affiné son analyse dans de très nombreux cas35, se fondant sur

3 3 Voir notamment les décisions

Veba/Degussa et Carnaud MetalBox/Crown Cork & Seal,

3 4 cf. décision de 1992 dans l'affaire

Nestlé/Perrier(1992)

3 5 pour ne citer que les principaux :

Kali und Salz (1993); Dalmine/Mannesmann/Ilva (1994); Gencor/Lonrho (1997); Price Waterhouse / Coopers & Lybrand (1998).

un faisceau de critères pour apprécier la probabilité de dominance oligopolistique36. Toutefois, jusqu'à l'arrêt de la Cour de justice du 1er mars 1998 relatif à la décision Kali und Salz, il demeurait une incertitude sur l'applicabilité du règlement concentration à la création ou au renforcement d'une position dominante collective. Cette incertitude a été levée par la Cour qui a confirmé récemment cette position à l'occasion de l'arrêt rendu sur la décision Gencor Lonnrho. Sur le second point, là aussi la Commission s'est préoccupée très tôt de cette question et a développé et affiné par la suite son analyse37, notamment en ce qui concerne les phénomènes de puissance d'achat38. Enfin, sur le dernier point, la révision du règlement en 1997 a ouvert la voie à une

3 6 Les caractéristiques préexistantes qui

soulèvent la question de la position dominante collective dans un marché donné sont notamment les suivantes: croissance modérée de la demande, demande inélastique, fort taux de concentration des offreurs, transparence du marché, produits homogènes, techniques de production parvenues à maturité, barrières élevées à l'entrée (notamment à cause de l'importance des coûts irrécupérables), liens structurels entre fournisseurs. Ces caractéristiques permettent aux fournisseurs d'adopter sans difficulté un comportement parallèle, voire les y encouragent, sans que la demande puisse faire contrepoids.

3 ' Cf. notamment la décision

Siemens/Italtel (1995); Nordic Sattelite Distribution (1995); Shell/Montecatini

(1996); Kirch/Bertelsmann; Kirch/Bertelsmann/Deutshe Telekom

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38 cf. notamment les décisions Kesko/Tuko (1997); Rewe/Meinl (1998)

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analyse des effets de coordination dans le cadre du règlement39.

3- Aides d'Etat

Le contrôle des aides publiques exercé par la Commission constitue sans conteste une mission d'une extrême sensibilité politique puisque la Commission intervient au cœur de décisions d'intérêt national ou régional de soutien à l'industrie ou d'aménagement du territoire. Certaines Autorités, et non des moindres, se sont toujours montrées réticentes à accepter l'idée d'une intervention effective de la Commission dans ce domaine.

La donne s'est par ailleurs sérieusement compliquée, puisque l'octroi de subsides étant de plus en plus régionalisé -surtout bien sûr dans les Etats fédéraux - ce ne sont plus seulement les Etats membres qui sont concernés mais aussi les régions de l'Union. Ainsi, par exemple, la Commission a dû récemment traiter de la question des aides fiscales accordées par la région autonome du Pays Basque. Ce glissement vers les régions de la compétence en matière d'aides va probablement s'intensifier dans les prochaines années.

Le niveau des aides dans l'Union demeure encore beaucoup trop élevé (pour la période

1995-3 9 cf. décision BT/AT&T (1999)

1997, le volume global des aides d'Etat accordées dans la Communauté s'élevait en moyenne à environ 95 milliards d'Euros) et la Commission doit maintenir sa pression pour diminuer ce niveau qui constitue une cause sérieuse de distorsions de concurrence.

Les Etats membres eux-mêmes ont d'ailleurs un intérêt objectif à encourager cette diminution suite à l'introduction de la monnaie unique qui suppose une discipline budgétaire rigoureuse de chacun.

Dans ce contexte, la Commission a, depuis quelques années, considérablement renforcé la discipline en matière d'aides. C'est ainsi, par exemple, qu'ont été adoptées les nouvelles lignes directrices concernant les aides d'Etat à finalité régionale qui visent non seulement à réduire l'étendue des régions admises à bénéficier des aides nationales à finalité régionale, mais aussi à diminuer substantiellement l'intensité maximale admissible de ces aides.

Dans la même optique de réduction du volume total des aides régionales, la Commission a adopté un encadrement "multisectoriel" qui introduit la possibilité d'un meilleur contrôle

pour les projets d'investissements susceptibles de

causer les distorsions de concurrence les plus fortes.

Je suis en outre, sur le point de proposer au Collège un nouvel

encadrement des aides à la restructuration des entreprises en difficulté qui devrait rendre plus strictes les conditions d'approba-tion de ces aides. Cette rigueur croissante de la Commission dans l'examen de la compatibilité des aides se concrétise d'ailleurs dans les faits puisque 31 décisions négatives ont été adoptées en 1998 et que pour les cinq premiers mois de l'année

1999 le nombre de décisions négatives est déjà de vingt.

Le champ d'application du contrôle par la Commission en matière d'aides s'est largement étendu depuis ma prise de fonction. La Commission s'était jusqu'alors concentrée

essentiel-lement sur les subventions au secteur manufacturier. Depuis lors, la Commission a étendu son action au domaine des services, notamment aux secteurs bancaire et audiovisuel. La première décision prise par la Commission dans le secteur bancaire, fut celle relative au Crédit Lyonnais. Dans le domaine audiovisuel, la Commission traite actuellement le délicat dossier des subventions aux télévisions publiques.

En outre, la Commission s'est attaquée à l'examen plus approfondi de formes d'aides plus "sophistiquées" comme les garanties ou les aides fiscales. S'agissant des garanties, l'accord que j'ai conclu en juillet 1993 avec M. Andreatta, alors ministre italien des affaires étrangères, est exemplaire. Aux termes de cet accord, l'Etat italien s'est engagé à mettre "hors jeu" une garantie de l'Etat

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illimitée prévue par le code civil italien (l'art. 2362) en faveur notamment du holding public IRI et de toutes les entreprises qu'il possédait. Les aides fiscales font, quant à elles, maintenant l'objet d'une approche cohérente par la Commission qui a adopté le 11 novembre 1998 une communication sur ce type d'aides. Dans la foulée, et en parallèle avec le code de conduite adopté par le Conseil sur les mesures fiscales dommageables, la Commission envisage d'utiliser ses pouvoirs en matière d'aides pour examiner 35 régimes d'aides fiscales existant dans l'Union.

Le renforcement de la discipline en matière d'aides et l'extension du champ d'action du contrôle exercé par la Commission s'est accompagné d'un renforcement de la transparence et de la sécurité juridique. En premier lieu, la Commission a intensifié son effort d'encadrement des règles en matière d'aides et, depuis mon entrée en fonction, une série importante d'encadrements, de lignes directrices ou de communications ont été adoptées40. Des règlements et

Encadrements des aides pour la protection de l'environnement, à la recherche-développement, à l'industrie des fibres synthétiques, aux PME, aux entreprises dans les quartiers urbains défavorisés, aux entreprises du secteur automobile, aux aides aux gros investissements (multisectoriel), aux aides à la formation, aux aides à la restructuration des entreprises en difficulté, aux aides à l'emploi, aux aides à finalités régionales. Communications sur la transparence des

décisions ont, en outre, été adoptés dans les secteurs de la sidérurgie et de la construction navale. En adoptant ces textes horizontaux, la Commission a fixé les critères qu'elle entendait appliquer lors de son évaluation de la compatibilité des aides en question avec l'intérêt commun. En second lieu, l'absence d'un règlement de procédure général en matière d'aides d'Etat avait entretenu pendant de nombreuses années une grande insécurité juridique. Sur base d'une proposition de la Commission, le Conseil a adopté le 22 mars 1999 un règlement de procédure qui aura pour effet d'améliorer la transparence et la sécurité juridique dans le domaine de contrôle des aides d'Etat, en précisant quels sont les différents stades de la procédure de contrôle et les droits et devoirs des intéressés à chacun de ces stades. Le règlement traite successivement des aides notifiées, des aides illégales, des cas d'application abusive des aides, des aides existantes et des modalités de contrôle. Ce règlement aura aussi pour effet immédiat d'imposer à la Commission des délais plus stricts à respecter, ce qui renforcera la discipline. Le règlement permet en outre à la

relations financières entre les Etats et les entreprises publiques, sur la coopération entre la Commission et les juridictions nationales dans le domaine des aides, sur les aides de minimis, sur les éléments d'aides contenus dans des ventes de terrains, sur l'assurance crédit à l'exportation à court terme, sur les mesures relevant de la fiscalité directe des entreprises, sur la réduction des coûts du travail, sur le taux de référence.

Commission d'exercer un contrôle strict du respect des décisions de la Commission en prévoyant notamment la possibilité de contrôle sur place dans les entreprises.

Enfin, sur proposition de la Commission, le Conseil a adopté le 7 mai 1998 un règlement relatif à l'application des art. 88 et 89 à certaines catégories d'aides d'Etat horizontales. Ce règlement qui consiste en une habilitation à la Commission pour décider par voie de règlement que certaines catégories d'aides sont compatibles avec le marché commun moyennant le respect de certaines conditions et ne doivent pas être notifiées préalablement aura pour objectif principal de décharger la Commission d'une partie de sa charge de travail, pour des aides ne soulevant pas de risque de distorsion de concurrence et de lui permettre de se concentrer sur les cas les plus difficiles.

V - La réforme des outils

Les bouleversements que j'ai évoqués plus haut, de la scène économique mondiale et européenne et les défis qu'ils posent à la politique de concurrence, commandent aujourd'hui la réforme en profondeur de notre système d'application des règles de concurrence. Je suis en effet convaincu, que nous touchons aujourd'hui aux limites des améliorations possibles du cadre actuel. Ces améliorations,

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nombreuses, apportées au cours de ces sept dernières années ont rempli leur rôle41. Une réforme d'une plus grande amplitude est maintenant nécessaire. Elle est d'ores et déjà "en chantier"42. En effet, le contexte dans lequel se conçoit et s'applique la politique de concurrence a profondément changé depuis les années 60 : le marché intérieur est aujourd'hui une réalité de même que l'union économique et monétaire, la globalisation de l'économie mondiale s'accroît chaque jour davantage et la perspective de l'élargissement rend impérieuse une réforme du système de contrôle qui assure son efficacité dans une Communauté à plus de 20 Etats membres. Enfin, cette réforme est aujourd'hui possible car l'application décentralisée des règles de concurrence, tant par les autorités que par les juridictions nationales, s'est développée notablement ce qui permet de rapprocher les centres de décisions du citoyen43.

Aujourd'hui, le système de contrôle communautaire est centralisé dans les mains de la Commission et repose sur une quasi obligation de notification des accords restrictifs. Il en

4 1 cf. ci-avant "antitrust"

4 2 Livre vert sur les restrictions

verticales (1995) et communication sur les lignes directrices en la matière (1998); Livre blanc sur la modernisation des règles de concurrence (1999).

4 3 La Commission a pris une part active

dans ce renforcement de la Collaboration avec les autorités à juridictions nationales, notamment en

adoptant et en mettant en œuvre deux communications relatives à cette question.

résulte trois inconvénients : 1) la Commission est trop absorbée par l'examen de ces notifications, généralement inoffensives, pour pouvoir pleinement consacrer ses ressources à la lutte contre les restrictions les plus graves (notamment les cartels et les APD); 2) les entreprises sont contraintes de notifier leurs accords pour garantir leur sécurité juridique, ce qui a un coût élevé et enfin; 3) l'application des règles communautaires de concurrence par les autorités et les juridictions nationales est

bloquée. Ce système qui était nécessaire au début des années 60 pour assurer le développement d'un droit communautaire de la concurrence cohérent, n'apparaît plus adapté aujourd'hui à une Communauté de 15 Etats membres amenée à s'élargir encore.

La réforme proposée dans le Livre Blanc sur la modernisation des règles de concurrence que la Commission vient d'adopter44, repose sur l'abolition du système de notification et d'autorisation et l'applicabilité directe de l'article 85 paragraphe 3. L'article 85 dans son ensemble serait appliqué par la Commission, les autorités nationales de concurrence et les tribunaux nationaux à l'instar de l'article 86. Cette réforme permettrait à la Commission de recentrer ses activités sur les infractions les plus graves du

44 ibid 42

droit communautaire, favori-serait l'application décentralisée des règles de la concurrence par les autorités et les juridictions nationales et supprimerait les coûts liés à la notification pour l'industrie. Les corollaires de cette réforme seraient: d'une part le développement du cadre législatif (règlements d'exemp-tion, communications, lignes directrices), de sorte à constituer un véritable "code européen de la concurrence", dont l'initiative resterait de la compétence exclusive de la Commission et; d'autre part le renforcement du contrôle a posteriori. Dans

certaines affaires particulièrement importantes,

des décisions constatant la compatibilité d'une entente avec l'article 85 continueraient d'être prises. La Commission garderait donc le rôle primordial dans la détermination de la politique de la concurrence de la CE.

Je suis convaincu que cette réforme est indispensable pour maintenir, voire renforcer l'efficacité de l'application des règles de concurrence.

VI- Développements internationaux

L'intégration toujours plus grande de l'économie mondiale suscite une interdépendance sans précédent entre les pays. Avec la conclusion de l'Uruguay Round en 1994, nous avons assisté à une accélération du démantèlement progressif des barrières commerciales qui a entraîné une énorme croissance

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des volumes d'échange. Dans de nombreux secteurs, les sociétés acquièrent un caractère multinational comme en atteste la vague récente de "méga-concentrations" ainsi que le nombre croissant d'alliances stratégiques internationales. Dans ces circonstances, les problèmes de concurrence prennent, eux aussi, une dimension mondiale et sont donc beaucoup plus difficiles à combattre, tant les autorités chargées de la concurrence au niveau national ou régional sont mal armées pour s'attaquer aux problèmes posés par des comportements commerciaux qui ont lieu hors de leurs frontières. Une coopération est indispensable pour traiter efficacement les problèmes de concurrence qui ont des caractéristiques transnationales. Il y a déjà un certain degré de coopération bilatérale, mais pour que cette coopération soit efficace, je suis convaincu qu'il est nécessaire de parvenir à un accord commun, au niveau international, sur le contenu d'un ensemble de base de principes fondamentaux du droit de la concurrence. Les avantages d'une telle coopération ne profiteraient d'ailleurs pas uniquement aux pays industrialisés, les pays en voie de développement pourraient aussi en retirer des bénéfices substantiels. Pour de nombreuses

économies "émergentes", notamment en Asie, 1998 a été une année de troubles et d'incertitudes. Il est généralement admis que l'une des principales causes des

problèmes subis par ces économies est l'absence de concurrence et d'ouverture réelle de leurs marchés.

C'est la raison pour laquelle, en 1994, un groupe composé de trois experts indépendants s'est réuni à ma demande pour examiner ces questions. Il a recommandé que les efforts portent, à l'avenir, sur deux fronts parallèles : premièrement, la poursuite de la coopération bilatérale de la Commission avec des pays tiers; deuxièmement, la mise en place d'un cadre multilatéral garantissant le respect, par tous les pays concernés, de certaines règles de concurrence fondamentales.

Au cours des dernières années, l'Union européenne a fait activement avancer la coopération bilatérale dans le domaine de la concurrence avec ses principaux partenaires commerciaux. Le meilleur exemple de cette coopération est constitué par les accords conclus avec les Etats-Unis, dont le premier a été signé en 1991 et est entré en vigueur en 1995. L'Union Européenne et les Etats-Unis s'engagent ainsi à coopérer dans l'application de la législation antitrust, et à ne pas agir de façon unilatérale et extraterritoriale tant que les voies de la courtoisie n'auront pas été épuisées. Cet engagement a été renforcé par l'accord sur la courtoisie active conclu avec les Etats-Unis en

1998, qui renforce les dispositions de l'accord de 1991 en prévoyant que les autorités

respectives de chacune des parties devront normalement ajourner ou suspendre leurs mesures d'application à l'égard de pratiques anticoncurrentielles commises principalement sur le territoire de l'autre partie et visant principalement ce territoire, lorsque l'autre partie est disposée à traiter l'affaire concernée. La Commission a également récemment conclu avec le gouvernement canadien, un accord bilatéral très proche de l'accord UE/USA de 1991. Des accords de coopération similaires existent déjà entre certains autres pays, par exemple entre les Etats-Unis et le Canada, et entre l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Des accords bilatéraux sur la concurrence d'un type quelque peu différent, destinés à ouvrir la voie à une future adhésion à l'Union Européenne, ont été conclus avec les pays d'Europe centrale et orientale ainsi que Chypre et Malte. La Communauté a, depuis lors, développé des relations étroites avec ces pays, y compris les États baltes. Par ailleurs, l'accord d'union douanière conclu en 1995 avec la Turquie constitue l'un des meilleurs exemples, pour les années écoulées, d'accord bilatéral contenant des dispositions détaillées sur la concurrence et les aides d'Etat45.

4 5 Les accords de libre-échange conclus

entre la Communauté et des pays tiers, notamment les accords d'association signés ces dernières années avec plusieurs pays méditerranéens, comprennent aussi généralement de telles dispositions. La Communauté vient de conclure une série d'accords de

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Toutefois, une coopération bilatérale ne prendra inévitablement en compte que les intérêts des pays concernés et risquera donc de négliger ceux des pays tiers. En outre, beaucoup de pays n'ont encore aucune législation sur la concurrence. De ce point de vue, la recommandation de l'OCDE de 1995 sur la coopération en matière de concurrence et la recommandation sur les ententes injustifiables qu'elle a adoptée au début de cette année, est un pas en avant important mais limité46. Voilà pourquoi je suis convaincu qu'un cadre multilatéral global adopté au niveau mondial et prévoyant l'application d'un ensemble de règles de base communes en matière de concurrence, doit être mis en œuvre comme complément nécessaire à la libéralisation des échanges. Aussi, en 1996, la Commission a proposé au Conseil, qui l'a accepté, que l'OMC mette sur pied un groupe de travail afin d'explorer les possibilités offertes en la matière. Cette proposition a

partenariat et de coopération avec la Russie, l'Ukraine et différentes autres ex-Républiques soviétiques.

4 6 De même, les règles actuelles de

l'OMC ne sont pas adaptées pour traiter les problèmes de concurrence. La décision rendue en avril 1998 par le groupe spécial de l'OMC chargé de régler un litige entre les Etats-Unis et le Japon, qui comportait des allégations de comportement anticoncurrentiel de la part de Fuji, dans le but d'interdire à son rival américain Kodak l'accès au marché japonais des pellicules et du papier

photographiques, constitue un exemple manifeste de cette inadéquation.

constitué la principale source d'inspiration de la décision ministérielle, prise à Singapour en décembre 1996, de créer un groupe de travail de l'OMC pour étudier les interactions entre le commerce et la politique de concurrence. Ce groupe s'est déjà réuni à plusieurs reprises et poursuit actuellement ses travaux. Bien que l'intérêt témoigné, tant par les pays industrialisés que par les pays en voie de développement (y compris certains pays qui n'ont pas de règles de concurrence nationales) au cours des discussions soit très encourageant, il est trop tôt pour dire si celles-ci aboutiront à la mise en route de négociations officielles entre les membres de l'OMC.

Je souhaite très fortement que de telles négociations prennent place, car la mise en place d'une forme de coopération multilatérale est pour moi essentielle pour garantir l'efficacité des politiques de concurrence dans une économie mondialisée.

Je formulerais pour conclure quatre propositions pour dégager un accord éventuel: premièrement, les membres pourraient accepter d'adopter chacun des règles de concurrence nationales et de mettre en place les organes d'application appropriés. Deuxièmement, les membres pourraient, dans le même temps, se mettre d'accord sur un ensemble commun de principes fondamentaux permettant de

traiter les pratiques concurren-tielles ayant une dimension internationale. Troisièmement, les éléments d'un instrument de

coopération multilatérale pourraient être également développés pour faciliter la coopération entre les autorités chargées de la concurrence. Enfin, il semblerait également logique de prévoir un mécanisme permettant le règlement des litiges dans des circonstances clairement définies. Ces propositions ne doivent pas être interprétées comme un appel à la création d'une nouvelle organisation internationale, disposant de pouvoirs d'enquête et d'application propres. Leur but est plutôt de servir de base à la création d'un nouveau cadre multilatéral qui aurait pour objet de renforcer le système commercial mondial en garantissant que la libéralisation et l'ouverture des marchés ne seront pas sapées par des

pratiques commerciales anticoncurrentielles. Ces propositions sont modestes, mais

néanmoins raisonnables et cohérentes, et elles devraient s'avérer efficaces pour faire face à l'un des plus importants défis auxquels sont confrontées les économies mondiales à l'approche du nouveau millénaire.

Conclusion

Nul ne peut contester le développement tout à fait extraordinaire de la politique de concurrence communautaire durant les années 1990. Elle

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touche désormais toutes les activités économiques, elle est crédible et respectée partout en Europe et, elle est devenue sur la scène internationale l'égale de la politique américaine de concurrence. Si tel est le cas, c'est parce que la responsabilité de cette politique a été confiée à la Commission, en lui donnant les moyens et les pouvoirs de décision autonome qui lui ont permis de devenir une autorité de concurrence indépendante, à même de garantir la bonne gestion et la crédibilité de cette politique. La tâche de la Commission a été grandement facilitée par le large appui dont elle a bénéficié de la part des Etats membres, du Parlement Européen, mais aussi de l'industrie européenne. Ce vaste consensus n'a pu être obtenu que parce que la politique de concurrence a été menée d'une manière équilibrée, avec le souci constant de concilier les objectifs de pure efficacité économique avec des considérations « sociétales » plus larges. Mais

le succès de la politique communautaire de concurrence tient également à sa cohérence. Cohérence en ce qui concerne l'application uniforme du droit de la concurrence sur tout le territoire européen ; cohérence de la politique menée dans les

différents secteurs économiques ; cohérence enfin

entre les différents volets de la politique de concurrence. Un département unique en charge de l'ensemble de la politique de concurrence, placé sous l'autorité d'un seul Commissaire, est une condition indispensable de cette cohérence, laquelle est vitale pour le succès de la politique de concurrence.

Mais au-delà, les progrès et les succès de la politique de concurrence au long de ces sept années n'ont pu être assurés que parce que j'ai pu compter à tout moment sur la loyauté et l'abnégation de collaborateurs entièrement dévoués à leur tâche, sur une Direction Générale et un service juridique travaillant

selon des standards exceptionnels de qualité, de

professionnalisme et d'indépendance. La politique

communautaire de concurrence ne continuera à gagner en respectabilité et en efficacité que si, à tout moment, cette indépendance et ce haut degré de professionnalisme sont garantis, en permettant aux services de la DG IV d'être dotés du personnel nécessaire pour mener à bien leurs tâches, mais aussi en les protégeant des interventions et de toutes sortes :

partisanes ou ainsi que d'un envahissant. C'est l'une des missions du Commissaire en charge de la politique de concurrence que d'être le garant rigoureux et vigilant de la protection de la neutralité et de la cohérence de la politique de concurrence, car sa crédibilité et son efficacité en dépendent en toutes circonstances.

pressions politiques, nationales lobbyisme pour moi centrales

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Au revoir à Karel Van Miert,

Un Commissaire européen aux

convictions fortes

Alexander SCHAUB, Directeur général de la DG IV

Au moment où Karel Van Miert quitte la Commission euro-péenne, il y a un large accord en Europe et au-delà : il s'est révélé comme un remarquable Commissaire à la concurrence. Il a convaincu comme garant de l'indépendance et de l'objecti-vité de la Commission et il est devenu l'initiateur d'une moder-nisation profonde qui va assurer à la concurrence une place centrale dans l'action de l'Union européenne au-delà de ce siècle. Comment expliquer une telle réussite ?

La DG « Concurrence » a eu le privilège de travailler avec un homme qui a fait avancer le droit de la concurrence et son appli-cation dans une période de chan-gements rapides et profonds. Il a développé des méthodes de travail originales et efficaces vers l'intérieur comme vers l'extérieur. Par ses qualités personnelles, il a inspiré respect, sympathie et parfois admiration, même à ceux qui, dans des cas individuels, n'étaient pas toujours heureux de la décision prise.

C'est à travers la prise de décisions individuelles que sa philosophie devient évidente : Utiliser les ressources limitées

de la manière la plus efficace au service des entreprises et surtout, au service des consommateurs, c'est-à-dire des citoyens euro-péens. L'exemple le plus illustratif en est la bataille que -avec d'autres - il a menée contre vents et marées pour la libé-ralisation des télécommunica-tions en Europe, qui offre des avantages pour les consomma-teurs comme pour les entreprises entrant nouvellement sur le marché.

Avec vigueur, M. Van Miert a lancé la modernisation du droit de la concurrence. L'expérience acquise pendant les 40 années de politique européenne de concur-rence était à la base de son travail. Il pouvait s'en prévaloir parce que le concept des pères fondateurs avait eu un succès inespéré au-delà de l'Europe communautaire. A la fois déter-miné et pondéré, il a fait preuve d'un jugement politique sûr quand il s'agissait de planifier une démarche par étapes successives. Les réformes déjà réalisées ou initiées concernent l'ensemble des domaines de la politique de concurrence : concentrations, aides d'Etat, application des articles 81 et 82, coopération internationale. Avec le Livre blanc sur la

moder-nisation des règles sur l'appli-cation des articles 81 et 82 du Traité de l'Union européenne, il a lancé un changement fonda-mental dans la répartition de la gestion des règles de concur-rence entre Commission et Etats membres, dont les avantages se feront sentir à l'avenir.

Très tôt, il a insisté sur l'importance de la dimension internationale du droit de la concurrence. Le renforcement de la coopération bilatérale, notam-ment avec les Etats-Unis, a été sa priorité. En vue des nouvelles activités de l'O.M.C, c'est lui qui a lancé, en 1995, le « Rapport Van Miert » sur « La politique de la concurrence dans le nouvel ordre commercial : renforcer la coopération et les règles internationales ». Ce document donne une des premières orientations vers un développement qui, depuis lors, s'est confirmé et accéléré.

Nous avons été frappés par l'enthousiasme avec lequel il a tenu à marquer le quarantième anniversaire de la DG « Concurrence » par une grande fête, avec tous les anciens Commissaires et Directeurs Généraux pour les remercier de leur contribution. A cette occasion, entendre parler M. von der Groeben, premier Commis-saire à la Concurrence dans la Commission Hallstein, des origines et des perspectives de notre politique pour le prochain siècle et comparer cela avec les orientations de M. Van Miert, a donné une impression de

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References

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